Paris le 9 décembre 2024
Les semaines se suivent et se ressemblent. Après avoir appris qu’une journaliste de Disclose ayant déjà effectué 39 heures de garde à vue dans des conditions très difficiles, avait également fait l’objet de mesures de géolocalisation, de surveillance et de filature par la DGSI, sous l’autorité de 2 juges d’instruction du tribunal judiciaire de Paris, et ce aux seules fins de découvrir ses sources, nous apprenons aujourd’hui qu’un autre journaliste du site Warning Trading aurait subi 48 heures de garde à vue dans une affaire de recel supposé de données, pour confirmer l’identité de sa source. Les autorités policières et judiciaires ont-elles donc décidé de piétiner les principes les plus élémentaires de la liberté d’informer ?
Si les journalistes ne sont pas au-dessus des lois et doivent naturellement répondre de leurs actes lorsqu’ils commettent des infractions, les autorités ne peuvent ignorer que la presse bénéficie de protections spécifiques, destinées à garantir la liberté fondamentale de l’expression. Telle est la fonction du secret des sources, protégé par la loi du 29 juillet 1881 et « pierre angulaire de la liberté de l’information » selon la cour européenne des droits de l’homme, qui ne peut céder que dans des conditions très strictes et exceptionnelles, toute mesure visant un journaliste devant obligatoirement répondre à un « besoin social impérieux ».
Or, les dernières mesures mises en oeuvre montrent un mépris certain et dangereux pour ces protections destinées à garantir l’exercice de la première des libertés fondamentales. Elles n’ont pourtant donné lieu à aucune réaction du pouvoir politique qui devrait être le garant de cette liberté, mais semble s’en désintéresser totalement voire les approuver au moins tacitement. Il laisse ainsi des juges, des procureurs et des policiers exercer une pression sur les médias dans l’indifférence, à l’heure où la désinformation sur les réseaux sociaux rend plus que jamais nécessaire de protéger les moyens d’une information libre et responsable.
On juge souvent l’état d’une démocratie à la façon dont elle traite sa presse. De telles pratiques contribuent à classer la France au 21ème rang mondial de la liberté de la presse. Cette énième et dernière séquence ne peut qu’alerter tous ceux qui sont attachés aux libertés fondamentales et nous exprimons notre très vive inquiétude face à ces coups de boutoir portés à la liberté d’expression, dans des conditions qui nous semblent dépourvues de toute proportionnalité. Nous en appelons donc à un sursaut du pouvoir politique et des autorités judiciaires, qui semblent avoir oublié le sens et le respect de ces valeurs fondamentales.
L’AAPDP entend préciser par souci de transparence que les journalistes en cause sont défendus par des avocats membres de l’association.